Parents : aider les jeunes à faire une entrée réussie sur le marché du travail
Par Chloé Machillot
24 avril 2019
Parce qu’ils sont plus mobiles en emploi, et ainsi souvent « nouveaux » dans leur lieu de travail, les jeunes sont particulièrement à risque d’avoir un accident de travail. En 2017, la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité au travail (CNESST) a recensé près de 11 000 cas de blessure par an chez les jeunes de 24 ans et moins, soit environ 30 chaque jour.
Le manque de formation est l’une des causes des accidents de travail chez les jeunes. On estime notamment qu’un travailleur court de 5 à 7 fois plus de risques de se blesser au cours de son premier mois d’embauche. Les jeunes ayant une forte mobilité sur le marché de l’emploi, ils sont plus souvent en situation de « nouvel employé ». Les emplois occupés par les jeunes comportent également plus de contraintes physiques et d’organisation telles que la manipulation de charges lourdes; et les horaires atypiques, la présence de produits toxiques et les tâches répétitives caractérisent souvent les premiers emplois. De plus, les 24 ans et moins travaillent plus fréquemment le soir ou la fin de semaine, avec un emploi du temps irrégulier, qu’ils doivent souvent concilier avec leurs études. Ces contraintes engendrent une fatigue qui peut représenter un risque pour leur sécurité et celle de leurs collègues.
Les obligations des employeurs
- Informer les jeunes des dangers présents dans l’entreprise.
- Offrir une formation et une supervision appropriées pour qu’ils réalisent leurs tâches en toute sécurité dès leur entrée en fonction et en cours d’emploi.
- Offrir des conditions de travail au moins égales à celles prévues par les normes du travail.
- Tenir compte des jeunes dans leurs travaux d’équité salariale, même s’ils travaillent à temps partiel.
Plusieurs sujets, tels que les drogues et l’alcool, font l’objet de conversations familiales, mais la thématique de la santé et la sécurité au travail est souvent absente des discussions parents-enfants. Alors qu’on sait que, depuis les 10 dernières années, près de 6 jeunes de 24 ans et moins en moyenne meurent d’un accident du travail chaque année au Québec. « Beaucoup d’adultes ne sont pas conscients des risques liés au travail de leur enfant », dit Sophie-Ève Despaties, conseillère en concertation à la CNESST. Mme Despaties et son équipe ont cependant noté que les parents sont toujours très sensibles à ce qui pourrait affecter leur progéniture. Comme l’observe Cynthia Camiré, conseillère en prévention jeunesse à la CNESST, « tous ont la sécurité de leur famille à cœur. »
Des réflexes à instaurer dès l’enfance
Plus une habitude est inculquée tôt, plus l’enfant l’assimile et l’applique tout au long de sa vie. L’adulte peut apprendre à son enfant à repérer les risques du quotidien et à adopter des réflexes pour s’en protéger. « Les parents, mais aussi les enseignants et les mentors qui accompagnent l’enfant dans sa construction sont considérés comme des modèles par ce dernier. Ils ont une influence sur ce qu’il va devenir et doivent être conscients de ce rôle pour montrer l’exemple », dit Robin Castonguay, enseignant en formation professionnelle et chargé de cours à l’Université de Sherbrooke dont le mémoire de recherche porte sur l’enseignement de la santé et la sécurité en formation professionnelle.
Le parent peut accompagner son enfant lorsqu’il décroche son premier emploi. Faire parler le jeune salarié de son cadre de travail, des tâches qu’il accomplit et des outils qu’il manipule permet de voir s’il est conscient que son poste peut comporter des risques et est capable de les repérer. Le parent peut aussi l’encourager à avoir suffisamment d’assurance pour les signaler à son employeur au besoin. « Trop de jeunes n’osent pas parler de leurs conditions de travail, dit Cynthia Camiré. Il suffit parfois d’une simple discussion avec son supérieur pour désamorcer une situation problématique. Les jeunes travailleurs doivent participer à l’identification et à l’élimination des risques avec leur employeur. Aucun emploi ne mérite qu’on mette sa vie en danger ! ».
Des outils pertinents pour accompagner votre enfant
La communication est difficile dans certains foyers à l’adolescence. Certains jeunes n’apprécient pas les questions de leurs parents qu’ils jugent intrusives. L’adulte peut alors tenter une approche légère, avec des questions simples suivies d’une écoute attentive. En voici quelques exemples :
- Comment s’est passée ta journée?
- Quelles étaient tes tâches aujourd’hui?
- Dois-tu travailler seul durant de longues périodes?
- As-tu reçu une formation pour manipuler telle machine?
- Ton superviseur montre-t-il de l’intérêt pour ton travail?
- Est-ce que ton employeur t’a fourni un équipement de sécurité?
La Loi sur la santé et la sécurité du travail stipule que chaque employeur a l’obligation d’offrir à ses travailleurs l’information concernant les risques présents dans l’entreprise, la formation, l’entraînement et la supervision appropriées afin qu’ils travaillent en toute sécurité dès leur entrée en fonction. Un jeune n’ayant pas reçu de formation suffisante lors de son embauche a le droit de la réclamer à son employeur. Le parent peut également orienter son enfant vers d’autres ressources utiles. La CNESST se fait un point d’honneur d’en faire partie et développe depuis 2016 sur son site Web jeunesautravail.com. Cette boîte à outils vise à répondre aux questions de toute la famille à travers des suggestions et des pistes de discussion, des capsules vidéo de témoignages et une foire aux questions. Elle constitue une référence solide pour les jeunes.
Enfin, il est essentiel de rappeler aux jeunes l’importance d’oser communiquer avec leur employeur. « En matière de santé et de sécurité au travail, il suffit souvent d’une discussion pour régler un problème. Si le jeune salarié a mal compris une tâche ou la méthode pour l’effectuer, s’il repère un risque pour sa santé et sa sécurité ou celles des autres, s’il a une question, il doit parler à son employeur, rappelle Sophie-Ève Despaties. Un employeur préférera toujours que ses employés posent des questions plutôt que de se blesser! ».