Le travail des préposées et préposés aux bénéficiaires sous la loupe

Par Catherine Couturier

1 octobre 2024

Photo : iStock.com/shapecharge

Pour optimiser le travail des préposées et préposés aux bénéficiaires et pour assurer leur bien-être, cette recherche, financée par l’Institut Robert-Sauvé en santé et sécurité du travail (IRSST), leur donne la possibilité de participer activement à l’élaboration de mesures de prévention.

S’occupant des tâches relatives à la vie quotidienne de personnes vieillissantes (de l’hygiène au déplacement en passant par l’alimentation), les préposées et préposés aux bénéficiaires (PAB) en centre d’hébergement et de soins de longue durée (CHSLD) constituent un des groupes les plus exposés en matière de santé et de sécurité en emploi. En plus des risques ergonomiques auxquels ils sont exposés, ils font également face à plusieurs risques pour la santé psychologique.

C’est pour mieux protéger et outiller ce personnel que Nathalie Jauvin, chercheuse et conseillère scientifique spécialisée en santé au travail à l’INSPQ, et François Aubry, professeur de travail social à l’Université du Québec en Outaouais, ont proposé un projet de recherche à l’IRSST.

Un rapport par et pour les PAB

Ces travailleuses et travailleurs ont, souvent en coulisses, exprimé le désir de collaborer davantage aux décisions concernant leur santé et leur sécurité au travail. C’est pourquoi cette étude, née d’une demande du terrain, vise à leur donner la parole et à les accompagner dans la définition de leurs propres besoins, puis dans l’élaboration et l’implantation d’un plan d’action en s’impliquant dans des groupes de soutien à l’intervention (GSI).

L’équipe de scientifiques a d’abord mené une série d’entrevues préparatoires dans trois CHSLD, pu ainsi dresser un premier portrait prépandémie, que d’autres entrevues et une série de questionnaires ont bonifé avec la reprise des travaux en 2021. « La COVID a frappé lors de la première phase de la recherche, ce qui a affecté certaines dynamiques, en plus de rendre difficile l’accès à ces milieux au cœur de la crise sanitaire », précise Nathalie Jauvin. Un GSI n’a donc été formé que dans deux des trois CHSLD.

Gérer les enjeux relationnels

Avant même d’entreprendre leurs interventions, les scientifiques ont observé que le contexte de travail des PAB des trois établissements comportait plusieurs facteurs qui facilitent et entravent leur travail : enjeux relationnels (tensions dans les équipes, instabilité des équipes, manque de soutien des collègues et des supérieurs, enjeux interculturels), sans compter les autres risques de blessures physiques.

L’équipe de recherche ayant identifié ces risques, les GSI se sont mis au travail. Formés majoritairement de PAB, ainsi que d’autres collègues (infirmières, infirmières auxiliaires, chef d’unité, etc.), ils avaient comme mandat de proposer des mesures spécifiques à leur milieu.

À titre d’exemple, un des CHSLD a décidé de se pencher sur la charge de travail élevée et le faible soutien des collègues. Le GSI a élaboré quatre mesures, incluant la clarification des tâches et des trajectoires de services, ainsi que l’unification des plans de travail. « Il y avait huit secteurs dans le CHSLD, et chacun travaillait différemment », relate Nathalie Jauvin. Grâce à ces mesures, le travail est devenu mieux articulé, même si la charge reste élevée. Pour faciliter l’intégration de nouveau personnel, le GSI a conçu un plan de travail de poche décrivant les tâches de façon simplifiée. Il a également produit une brochure destinée aux familles des résidents pour les sensibiliser au rôle qu’elles peuvent jouer auprès de leurs proches.

Tout au long de l’intervention, une boîte recueillait les suggestions en continu, ce qui a permis d’engager rapidement des actions concrètes.

Entre espoir et inquiétude

« Pour nous, l’intérêt est d’apprendre de ces démarches et voir ce qui est transférable dans d’autres milieux », explique Nathalie Jauvin. L’équipe a ainsi déterminé les défis et les conditions préalables à la mise en place de telles initiatives.    « C’est par l’engagement et la participation qu’on va être capables de développer des mesures en santé et sécurité au travail. On a beau proposer des mesures, les gens doivent se les approprier », remarque Nathalie Jauvin.

La chercheuse espère que les travaux amorcés dans cette étude pilote seront pérennisés dans les milieux. « Lorsque la recherche se termine, est-ce que le milieu va conserver ce qui a été mis en place ? Ça reste une préoccupation, et ce, dans tous les milieux où on réalise une intervention », conclut Nathalie Jauvin.

Pour en savoir plus

Rapport : Recherche-action visant le développement d’un modèle d’intervention préventive en SST par et pour les préposés aux bénéficiaires en CHSLD (R-1201-fr)

Chercheuses et chercheurs : Nathalie Jauvin, François Aubry, Francis Etheridge, Isabelle Feillou, Éric Gagnon, Andrew Freeman, Nancy Côté, Caroline Biron, Mariève Pelletier, Saliha Ziam, Manon Truchon UQAM.

IRSST

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