Un pont entre le terrain et la science : la veille et la mobilisation des connaissances à l’IRSST
Par Max Hugny
1 juillet 2025
Illustration : Yves Boudreau
Depuis 2023, l’Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et sécurité du travail (IRSST) s’est doté d’une équipe clé pour répondre aux questions des partenaires en SST.
Comprendre les besoins des milieux de travail, traduire les connaissances scientifiques en solutions concrètes et livrer rapidement des outils pertinents : c’est ce qui occupe le quotidien du personnel de la Direction de la veille et de la mobilisation des connaissances (DVM). Contrairement aux unités qui se consacrent à la recherche, elle n’a pas le mandat de produire de nouvelles données, mais plutôt de rassembler les connaissances découlant des études pour en tirer une compréhension contextualisée, synthétisée, et prête à transférer aux partenaires sociaux en SST.
Tout commence par une question
La DVM est née d’un constat durant la pandémie : les milieux de travail ont souvent des questions urgentes en SST, ancrées dans la réalité du terrain, requérant un éclairage fiable et rapide.
« Certains disaient : la recherche prend du temps, et nous devons agir, prendre des décisions rapidement. Cela montre à quel point il est essentiel de trouver un équilibre entre l’urgence de l’action et le temps nécessaire à une réflexion éclairée », se rappelle Marie-France Duranceau, directrice de la DVM.
Le travail des conseillères et conseillers en mobilisation de connaissances part donc toujours d’un questionnement d’un partenaire sur un sujet précis. Leur objectif : apporter des réponses concrètes, adaptées au terrain, et des outils d’aide à la prise de décision, au changement ou à l’évolution dans le milieu de travail. Et aussi, s’assurer de le faire dans un temps opportun. « C’est pourquoi on implique les partenaires dès le début, et tout au long du processus, pour que les connaissances mobilisées collent au terrain, qu’il n’y ait pas un écart entre la science et la pratique, pour que les réponses apportées puissent être facilement intégrées », explique Marie-France Duranceau.
Un dialogue constant entre les connaissances et le milieu
Concrètement, lorsqu’un partenaire a une question en SST – que ce soit sur l’ergonomie, l’hygiène, la réadaptation et le retour en emploi, la sécurité, les risques psychosociaux ou les personnes en vulnérabilité au travail, – il peut faire appel à la DVM. Les conseillères et conseillers s’assurent d’abord de bien cerner son besoin pour produire un devis correspondant à sa demande, notamment en termes de temps. C’est ce qui permet de soutenir la partie exploratoire, laquelle consiste à examiner les données disponibles sur le sujet. « Un de nos atouts, c’est d’aller chercher différents types de connaissances, détaille Marie-France Duranceau. Il y a les articles scientifiques, évidemment, mais aussi la littérature grise (c’est-à-dire tous les rapports, guides de pratiques, lignes directrices, etc., rédigés par des experts et souvent très utiles), les connaissances contextuelles (comme les règlements, le contexte sociopolitique) et les connaissances pratiques, directement issues du milieu. » Pour réaliser cette revue des connaissances, la DVM peut compter sur la rigueur scientifique des professionnelles en sciences de l’information du centre de documentation de l’IRSST.
Afin d’assurer un véritable échange avec les partenaires, la DVM forme un comité de suivi paritaire, adapté à chaque activité. En plus des demandeurs, ce groupe se compose de parties prenantes et de chercheuses et chercheurs de l’IRSST. Ce dialogue régulier permet de valider que le processus va dans la bonne direction, et ce, jusqu’aux outils livrés à sa fin.
Un soutien pour les milieux de travail et pour l’IRSST
Les outils bien vulgarisés rassemblant les connaissances pertinentes peuvent prendre différentes formes, choisies en collaboration avec les partenaires : rapport, vidéos, infographies, fiches pratiques, mais aussi bandes dessinées ou Foires aux questions. Aux demandeurs de voir comment ils souhaitent ensuite les mettre en pratique : « Ça peut être de la sensibilisation, on n’a pas forcément besoin de revoir toutes les règles de son entreprise ! », souligne Marie-France Duranceau. Les outils créés restent ensuite accessibles à tous et gratuitement sur le PhareSST, le dépôt institutionnel de l’IRSST : « L’idée, c’est que ce qu’on produit soit public, que d’autres personnes puissent l’utiliser ensuite. »
Les productions de la DVM comprennent d’ailleurs toujours une annexe permettant de s’assurer de la rigueur méthodologique du processus, soit des outils de référence, donc solides et vérifiables.
En fait, « la DVM agit aussi comme un levier scientifique complémentaire à la recherche. Par exemple, le travail de mobilisation peut mettre en évidence des manques dans la recherche existante », précise la directrice. Dans cette optique, la DVM a implanté une veille stratégique sur plusieurs sujets clés, dont, récemment, l’intelligence artificielle au travail. Il est possible pour tous et toutes de s’abonner pour les recevoir directement dans le courriel.
En choisissant de rester toujours proche du terrain, la DVM apporte ainsi un soutien transversal au reste de l’Institut. « À l’IRSST, en plus d’être un levier scientifique, on amène les besoins du milieu au reste de l’organisation. On est comme un pont entre les questions du terrain et les questions scientifiques », conclut Marie-France Duranceau.