Robert Legros

La prévention gravée sur le coeur

Par Gabrielle Fallu

19 septembre 2023

Photo : Collection personnelle

Diplômé de l’Institut de chimie et de pétrochimie du Collège de Maisonneuve, Robert Legros travaille à la raffinerie Valero depuis 2010, où il a d’abord été embauché comme opérateur de raffinage. Passionné par la prévention, il est devenu représentant en santé et sécurité (RSS) dans son milieu de travail. Nous nous sommes entretenus avec lui afin d’en apprendre davantage sur son parcours, son rôle, ses buts et ses convictions profondes en lien avec la santé et la sécurité du travail.

M. Legros, comment êtes-vous devenu représentant en santé et sécurité et coprésident du comité santé-sécurité dans votre entreprise?

ROBERT LEGROS Depuis mon arrivée à la raffinerie, j’ai évolué dans l’entreprise où plusieurs possibilités m’ont été offertes. En plus de gravir les différents échelons de mon secteur opérationnel comme opérateur, j’ai rapidement intégré la brigade incendie. En 2013, j’ai entamé un mandat comme représentant syndical de mon secteur. À l’époque, mon rôle était de représenter et d’accompagner les travailleuses et les travailleurs de mon secteur en matière de relations de travail et de conventions collectives. Par la suite, j’ai été nommé vice-président de l’exécutif syndical. Ce rôle m’a permis d’accroître mes connaissances en ce qui a trait à la législation tant provinciale que fédérale. Il était également de mon devoir d’accompagner les victimes d’accidents du travail et de maladies professionnelles dans le processus de réclamation de la CNESST. Toutefois, à l’époque, l’exécutif syndical était très peu impliqué en matière de prévention des accidents du travail. Nos efforts étaient concentrés sur le suivi des réclamations jusqu’en 2017, moment où nous avons décidé de nommer, au sein même de l’exécutif syndical, un représentant en santé et sécurité pour soutenir les travailleuses, les travailleurs et l’entreprise en matière de prévention des accidents. En 2019, lors du renouvellement de la convention collective, nous avons donc intégré le tout premier représentant en prévention de la raffinerie, en près de 50 ans d’exploitation. Comme j’avais un mandat similaire auparavant, l’exécutif a proposé de me nommer représentant en prévention pour un mandat de quatre ans. Ma candidature a été entérinée par les employés syndiqués. C’est donc un honneur et un plaisir pour moi d’être, depuis 2020, le tout premier représentant en prévention de l’histoire de la raffinerie. J’ai suivi plusieurs formations en santé et sécurité du travail, dont des formations données à l’interne par Valero. En 2021, grâce à la collaboration et à la participation de mon employeur, j’ai obtenu ma certification d’agent de sécurité sur les chantiers de construction délivrée par la CNESST. Grâce à cette formation, mais également à toutes celles que j’ai suivies auprès d’Unifor, de la FTQ et de Valero en matière de santé et sécurité du travail, je me sens bien outillé et je peux contribuer activement à l’amélioration de la santé et de la sécurité dans mon milieu de travail.

Pour vous, comment se passe une journée typique au travail?

R. L. Chez Valero, nous avons la chance et le plaisir d’avoir une équipe multidisciplinaire en santé et sécurité du travail (SST). Nous avons des spécialistes en santé et sécurité, des hygiénistes industriels, des préventionnistes, des techniciens et techniciennes en santé et sécurité… Les membres de l’équipe collaborent pour créer un milieu de travail sécuritaire, et je suis fier de faire partie intégrante de cette équipe. Nous commençons chacune de nos journées avec une rencontre, qu’on appelle le kick-off meeting. On y discute des enjeux de santé et sécurité dans l’entreprise, des récents incidents, des travaux à exécuter durant la journée… Ainsi, l’équipe est informée des défis auxquels elle fait face et elle peut se pencher sur la façon d’éliminer les risques. Après cette rencontre, j’effectue mes tâches quotidiennes, comme faire des vérifications auprès des milieux de travail, recevoir les avis d’accidents et d’incidents, accompagner l’inspecteur de la CNESST, épauler les travailleuses et les travailleurs dans l’exercice de leurs droits, collaborer avec l’employeur pour améliorer le programme de prévention. Bref, je suis impliqué dans presque tout ce qui touche la santé et la sécurité dans mon milieu de travail, et c’est passionnant.

Quelles sont les tâches que vous préférez?

R. L. J’ai travaillé longtemps en réclamation avant de travailler en prévention et je n’aimais pas le fait de ne pas être impliqué afin d’éviter les accidents de travail. Étant donné que je concentrais mes efforts sur l’accompagnement des travailleuses et des travailleurs blessés, je trouvais qu’il manquait une partie à mon travail. Depuis 2020, la prévention me passionne et elle est devenue extrêmement importante pour moi. J’aime trouver de nouvelles façons sécuritaires de travailler. J’aime informer et mobiliser les gens. Je tente d’améliorer la culture de prévention, à la fois chez les travailleuses et les travailleurs et dans l’entreprise, pour que les choses changent réellement. C’est ça qui me nourrit, car il y a de réels gains à faire.

Pourquoi la SST est-elle si importante pour vous?

R. L. Je me suis fait une promesse : je ne veux pas vivre une situation dans laquelle je devrai expliquer ce qui a entraîné des blessures graves ou le décès d’une travailleuse ou d’un travailleur à ses amis et à sa famille ainsi qu’à mes collègues. J’ai la conviction profonde que je peux faire une différence par mes actions et mon implication afin d’améliorer la santé et la sécurité dans mon milieu de travail. Et puis il faut dire que, même si j’aime mon travail, ce que j’ai de plus précieux se trouve à la maison, c’est-à-dire mon épouse et mes trois beaux enfants que j’aime. Et bien sûr, ils s’attendent à ce que je rentre à la maison, sain et sauf, chaque soir. J’aime croire que mon implication peut permettre à mes collègues de faire la même chose, car l’essentiel ne se trouve souvent pas ici, au travail, mais plutôt à la maison.

Avez-vous déjà vécu une expérience marquante lors de laquelle la santé et la sécurité n’ont pas été respectées?

R. L. J’ai été marqué par un incident qui m’a été raconté lors de l’une des nombreuses formations en SST que j’ai suivies. Un coordonnateur SST nous a dit avoir été témoin d’un accident mortel au sein de son entreprise, il y a quelques années. La manière dont il nous a raconté cette histoire m’a marqué pour le reste de mes jours. Cet homme, accompagné de la police locale, a dû aller annoncer la nouvelle à l’épouse du travailleur décédé, qui était père de quatre enfants. Son fils de 10 ans était alors à la maison. La réaction de cet enfant a été à la fois stupéfiante et criante de vérité : il n’était pas triste ni sous le choc, mais plutôt surpris, car il croyait qu’il y avait erreur sur la personne. Pour lui, il était inconcevable que son père ne revienne pas à la maison après le travail. Chaque jour, il le voyait partir travailler le matin et revenir le soir. Pour cet enfant, il était impossible de perdre la vie au travail. Lorsque j’ai entendu cette histoire, j’ai compris qu’il ne fallait jamais banaliser des actions dangereuses, car un accident peut changer dramatiquement la vie de nombreuses personnes.

Comment faites-vous la promotion de la SST dans votre milieu?

R. L. Mon rôle est de tisser des liens solides entre les travailleuses et travailleurs et l’employeur sur le plan de la santé et de la sécurité du travail. Faire évoluer la culture d’une personne, d’un groupe ou d’une entreprise en matière de SST n’est pas chose facile! Ainsi, j’adapte souvent mes messages pour être bien compris et pour que les travailleuses et les travailleurs adhèrent aux propositions que je leur fais. Je ne parle pas de la même manière à un travailleur sur le terrain qu’à un directeur. J’accompagne les gens vers le changement en les écoutant pour comprendre, non pour mettre de l’avant mes arguments personnels. En terminant, si j’avais une pensée à offrir aux autres RSS, ce serait la suivante : les grandes victoires sont le résultat de grandes batailles. Il est naturel que votre mandat soit difficile, ingrat ou parsemé d’embûches et de défis, puisque la finalité est tellement importante : éviter que vos collègues et vos amis se blessent sérieusement ou, pire, qu’ils décèdent au travail.

Deux conseils de Robert Legros pour bien faire passer son message

  1. Adapter son discours à son interlocuteur pour être bien compris
  2. Écouter les gens pour les comprendre, non pour mettre de l’avant ses arguments personnels

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