Stratégies pour aider les PME à mieux gérer le retour et le maintien durable en emploi après une blessure
Par GUY SABOURIN
12 septembre 2023
Photo : Istock
Le retour et le maintien durable en emploi (RMDE) après une blessure ou une maladie reliée au travail exercent une grande influence sur la santé et le rétablissement de l’individu, la réduction de l’invalidité ainsi que l’amélioration de la productivité et de la sécurité.
« Le RMDE permet également d’atténuer les coûts importants pour les employeurs, les contribuables et la société dans son ensemble, explique Iuliana Nastasia, ergonome, chercheuse à l’IRSST et autrice de l’étude Stratégies de gestion de la santé et de la sécurité du travail en contexte de petites et moyennes entreprises favorisant le retour et le maintien durable en emploi des travailleurs après une blessure reliée au travail : une revue de littérature ». La chercheuse précise que cette analyse s’inscrit dans une recherche plus large visant à mieux outiller les PME du Québec en matière de prévention de l’incapacité prolongée.
Le RMDE est un des aspects de la santé et de la sécurité du travail que les PME (500 employées et employés ou moins) doivent améliorer. Dans les grandes entreprises, le maintien du contact pendant l’absence, l’enquête sur les causes de la blessure, l’évaluation des capacités de la personne touchée, de son poste et de son environnement de travail par des ressources internes et externes, la reprise du travail en assignation temporaire, ainsi que le retour progressif ou définitif font partie des pratiques courantes. La prévention de l’incapacité prolongée et le RMDE posent toutefois des défis particuliers aux PME. Réglementation, politiques, inspections et interventions concernant la SST peuvent leur sembler plus complexes, les entreprises de moins de 50 employés, tout comme les microentreprises, disposant de moins de ressources financières et humaines. De plus, leur processus de décision est souvent centralisé autour de la propriétaire-dirigeante ou du propriétaire-dirigeant.
« Il faudrait aux PME des solutions adaptées en termes de gestion de la SST, poursuit Iuliana Nastasia. Et c’est pourquoi l’objectif de notre recherche était de découvrir et de décrire, dans les études portant sur la gestion de la SST, des stratégies pouvant être transférables et applicables au RMDE dans différents contextes et différentes tailles de PME, surtout au Québec. »
Un savoir transférable
Les efforts de promotion et de gestion de la SST dans les PME n’incluent souvent pas le RMDE. C’est un constat. « La littérature consultée mentionne peu de ressources, structures ou activités touchant la gestion de l’incapacité au travail et les pratiques de RMDE », indique Iuliana Nastasia. Autre constat : des lacunes dans le programme de SST d’une PME ont des répercussions sur le RMDE.
La même littérature fait aussi ressortir quatre stratégies principales pour améliorer la SST dans les PME, lesquelles, selon la chercheuse, seraient transférables pour améliorer la gestion de l’incapacité et le RMDE. Il s’agit de diffuser, disséminer et échanger de l’information concernant la SST ; d’acquérir et de transmettre connaissances, compétences et savoir-faire dans la gestion de la SST ; d’utiliser une approche participative et collaborative en matière de SST ; et enfin, de tenir compte des caractéristiques et du contexte organisationnel d’une PME dans sa gestion de la SST.
« Le RMDE fait partie de la gestion globale de la SST », remarque Iuliana Nastasia. Les modèles tant de gestion de l’incapacité que de la SST partagent d’ailleurs des fondements communs permettant d’envisager la transférabilité vers la gérance de l’incapacité et du RMDE. Engagement des employeurs, collaboration et communication entre les parties prenantes, participation et implication des travailleuses et travailleurs, soutien de spécialistes de la santé et de la sécurité du travail constituent tous des principes de base, autant pour la promotion de la SST en général que pour la prévention de l’incapacité et le RMDE.
Sur le plan législatif, la Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail, adoptée en 2021, bonifie le droit au retour au travail. « Certaines dispositions de cette loi auront une influence favorable sur les pratiques de RMDE dans les PME, explique Iuliana Nastasia. Par exemple, l’encadrement de l’obligation raisonnable d’accommodement favorisera le retour au travail prompt et durable dans son emploi ou un emploi convenable chez son employeur, et facilitera la réintégration d’une personne ayant subi une lésion professionnelle. »
Quelques pistes pour favoriser le RMDE
« L’émergence de nouvelles technologies, de nouvelles valeurs sociétales, l’évolution démographique, les nouvelles structures d’entreprise permettant des modalités de travail plus flexibles et la rareté de la main-d’oeuvre constituent à nos yeux des occasions pour développer un retour au travail plus efficace, non seulement pour la productivité, mais aussi pour le maintien durable en emploi, affirme Iuliana Nastasia. Les rôles des intermédiaires (assureurs, professionnelles et professionnels de la santé, ASP, fournisseurs, etc.) pourraient également être revus pour leur permettre d’appuyer davantage les PME dans l’établissement des pratiques de RMDE. Les canaux de transmission de l’information entre les différentes parties prenantes pourraient aussi être améliorés. »
Pour en savoir plus
Rapport : irsst.info/r-1177