Les inspectrices et inspecteurs de la CNESST : un métier, plusieurs rôles

Par Karolane Landry

10 Décembre 2024

Photo : CNESST

Les inspectrices et inspecteurs de la CNESST jouent un rôle majeur en santé et en sécurité du travail (SST) au Québec. Qu’il s’agisse de réaliser des enquêtes d’accidents, de visiter les milieux de travail ou de soutenir les employeurs ainsi que les travailleuses et travailleurs, leurs tâches sont très variées. Plongez dans le quotidien de ces personnes qui font de la SST une réelle mission de vie, grâce au témoignage d’Éric Dupont, inspecteur à la Direction régionale de Montréal de la Prévention-inspection.

Tout d’abord, il faut savoir que les inspectrices et inspecteurs sont issus de divers milieux. Il n’y a pas de profil unique pour exercer ce métier. Plusieurs expertises sont reconnues. « Ça fait maintenant 15 ans que je suis inspecteur à la CNESST, confie Éric Dupont. J’ai un baccalauréat en génie mécanique. Au début de ma carrière, je me suis beaucoup intéressé à la sécurité des machines. De plus, je suis quelqu’un qui adore le contact humain, qui aime expliquer et partager des connaissances. »

Selon M. Dupont, la qualité principale d’une inspectrice ou d’un inspecteur est son engagement envers la SST. « Il faut y croire, affirme-t-il. Mon rôle n’est pas seulement d’émettre des dérogations, d’appliquer bêtement la loi, puis de repartir. Quand je me présente dans un milieu de travail, je veux accompagner les gens et les soutenir. Il faut être extrêmement investi. »

De nombreux chapeaux à porter

Un objectif des inspectrices et inspecteurs? Soutenir les employeurs, les travailleuses et travailleurs et les convaincre de l’importance de prendre en charge la SST. « Certaines de nos interventions dans les milieux de travail se déroulent à la suite de plaintes reçues, explique M. Dupont. Tout le monde peut en faire, de façon anonyme ou non. De plus, nous intervenons dans les milieux à la suite d’accidents du travail. » Certaines interventions ne sont pas planifiées et peuvent survenir à tout moment, comme à la suite d’un accident mortel ou d’un refus de travail. À cela s’ajoute la rédaction de rapports. « Toute intervention aboutit à la création d’un rapport d’intervention, précise M. Dupont. Il s’agit d’un outil de communication pour résumer nos observations et les informations recueillies. C’est dans ce document que l’on consigne les dérogations et les décisions. Il fait également ressortir ce que les employeurs et les travailleuses et travailleurs font de positif dans le milieu de travail, notamment en ce qui a trait aux mécanismes prévention et de participation. » Par exemple, on peut souligner la prise en charge efficace d’un risque intégré au programme de prévention ou mentionner la participation collaborative de l’employeur, des travailleuses et travailleurs au comité de santé et de sécurité. Les inspectrices et inspecteurs doivent également maintenir à jour leurs connaissances en SST par des lectures et de la formation. De plus, ils collaborent à des enquêtes du coroner pour partager les conclusions de leurs rapports d’enquête d’accidents mortels.

Cap sur les accidents mortels

Pour chaque enquête sur une situation qui a mené à un accident mortel, deux inspectrices ou inspecteurs travaillent en collaboration. Alors que la personne responsable du « contenu » s’occupe de la cueillette des faits, l’autre, qui s’attarde davantage au « processus », a la charge de l’enquête. Dans certains cas, le réseau d’expertise de la CNESST, qui regroupe plusieurs experts sur divers sujets liés à la SST, contribue à l’enquête en lien avec un sujet précis. « On ne peut pas tout connaître, avoue M. Dupont. Il est possible qu’une enquête nous sorte de notre zone de confort. C’est là où le réseau d’expertise nous donne un grand coup de main. C’est vraiment un beau travail d’équipe. »

Ainsi, chaque fois qu’un accident de travail mortel survient au Québec, les inspectrices et inspecteurs sont dépêchés sur les lieux dans les plus brefs délais. « Ce sont souvent les policiers qui nous avisent, après être intervenus avec les pompiers en tant que premiers répondants et avoir sécurisé la scène de l’accident, explique M. Dupont. Nous n’avons donc pas le choix de nous déplacer rapidement. Je suis déjà intervenu sur les lieux d’un accident qui impliquait un remorqueur dans une bretelle d’accès à l’autoroute. On devait agir très vite, en s’assurant toutefois d’effectuer notre travail adéquatement. »

Dès que les inspectrices et inspecteurs arrivent sur la scène de l’accident, ils s’assurent de faire sécuriser le milieu de travail par des actions immédiates. Ils peuvent, par exemple, interdire l’utilisation de l’équipement en cause en apposant un scellé, fermer un lieu de travail, en tout ou en partie, ou interdire un procédé ou une méthode de travail. Ils peuvent également s’assurer que les travailleuses et travailleurs sont bien pris en charge et dirigés vers les bonnes ressources. « Il faut aussi penser aux gens sur place, dit M. Dupont. Pour eux, c’est un collègue, un ami, un proche qui a subi un accident. Dans le cadre de nos interventions, on s’assure que le volet humain est couvert, que le volet psychosocial est pris en charge. »

Puis commence la cueillette des faits, qui permettra l’identification des causes. « Notre mandat est d’identifier les causes de l’accident, pas de trouver des coupables, affirme l’inspecteur. L’objectif est d’exiger que des mesures correctives et préventives durables soient mises en place dans le milieu de travail pour éviter que des accidents surviennent. » Ainsi, les faits liés à l’accident sont recueillis à l’aide d’outils ou de méthodes. « Selon le type d’accident, on va prendre des photos et des mesures, demander des documents, des fiches techniques, des fiches de données de sécurité, des manuels et de l’information concernant un équipement ou un procédé. On rencontre les témoins de l’événement, les collègues et l’employeur pour les questionner sur la gestion de la SST dans l’entreprise, les mécanismes de prévention et de participation des travailleurs, les méthodes de travail et les façons de faire », ajoute-t-il. Bref, tout est passé au peigne fin!

Identifier les causes

Lorsque tous les faits ont été recueillis auprès du milieu de travail, les inspectrices et inspecteurs suivent une méthode rigoureuse appelée « arbre des causes ». « L’objectif est de mettre sur papier tous les faits que nous avons pour ultimement faire ressortir les causes de l’accident, explique M. Dupont. Ça nous permet d’expliquer, d’organiser et de valider les informations recueillies. Il faut voir ça comme un outil qui permet de faire un travail complet, sérieux et précis. » Une fois que les causes ont été déterminées, l’équipe d’inspecteurs et inspectrices peut compléter la rédaction de son rapport d’enquête afin de le présenter à l’employeur et à la famille de la personne accidentée, si elle le souhaite. Le rapport est aussi rendu disponible au grand public, en version dépersonnalisée, pour qu’il soit utilisé comme outil de prévention.

D’ailleurs, après plusieurs années à exercer ce métier, Éric Dupont se réjouit de constater l’évolution graduelle dans la prise en charge de la SST par les milieux de travail. « Ils ont maintenant accès à tellement d’outils et de ressources pour les aider à progresser en SST. C’est très encourageant », termine-t-il.

« Quand je me présente dans un milieu de travail, je veux accompagner les gens et les soutenir. Il faut être extrêmement investi. »

– Éric Dupont, inspecteur à la Direction régionale de Montréal de la Prévention-inspection

Des accidents mortels qui ont laissé leur marque

  • Le 3 mars 2023, un chauffeur livre un chariot élévateur dans une entreprise. Les dimensions de la porte du quai ne permettant pas le déchargement du chariot, le chauffeur déplace sa remorqueuse pour le décharger au sol. Alors qu’il amorce les manœuvres d’inclinaison de la plateforme, le manutentionnaire monte sur celle-ci pour accéder au poste de commande du chariot élévateur et désengage le frein de sécurité. Le chariot se déplace alors vers l’arrière, bascule et se renverse. Le travailleur est éjecté de son poste, frappé par la structure du chariot et s’écrase au sol. Il est transporté vers un centre hospitalier où son décès est constaté.
  • Le 19 mars 2020, un travailleur décharge des dalles de quartz brut non palettisées dans un conteneur. Pour décharger les deux derniers paquets de dalles, il entre dans le conteneur et se place entre les paquets et la paroi du conteneur. Il retire une partie de la structure de stabilisation en bois, qui retient entre elles les dalles restantes. C’est alors qu’un premier paquet de dalles, pesant 3 385 kilogrammes, bascule et coince le travailleur contre la paroi du conteneur. Quelques secondes plus tard, le second paquet de dalles bascule et s’appuie sur le premier, causant le décès du travailleur.
  • Le 18 septembre 2017, un travailleur effectue des travaux de maintenance sur l’ascenseur d’un bâtiment à Montréal. Il accède au toit de la cabine en actionnant le mode inspection sur le dispositif de commande afin qu’aucun usager ne puisse appeler ou utiliser l’ascenseur. Alors qu’il est toujours sur le toit de la cabine, il remet manuellement l’ascenseur en mode de fonctionnement normal. Un usager appelle alors l’ascenseur, qui se met à monter. Le travailleur se retrouve alors coincé entre la structure de la cabine et le rail palier. Son décès est constaté sur place.

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