Un travailleur est frappé par la foudre
Par Geneviève Chartier
24 janvier 2023
Illustration : Jean-Philippe Marcotte
En août 2021, un travailleur effectuait des tâches à découvert dans un champ de choux-fleurs à proximité d’une ferme à Oka. Lorsqu’un orage est passé au-dessus du champ, la foudre a frappé le travailleur, qui est malheureusement décédé de ses blessures. Retour sur les circonstances de cet accident… et sur ce qu’il aurait fallu faire pour l’éviter.
Que s’est-il passé?
Le jour de l’accident, douze travailleurs avaient pour tâche d’attacher les feuilles des plants de choux-fleurs avec des élastiques sur toute la superficie du champ. Cela visait à maintenir les feuilles fermées sur les choux-fleurs pour éviter qu’ils ne jaunissent sous les rayons du soleil. Cette tâche devait prendre fin vers 20 h. À 18 h 30, un nuage gris foncé a assombri le ciel. Les travailleurs ont récupéré des imperméables dans des véhicules stationnés à proximité du champ. Vers 19 h 30, un nuage gris foncé accompagné de pluie s’est déplacé au-dessus de la ferme et du champ. Les travailleurs ont alors mis le capuchon de leur imperméable et ont poursuivi leur tâche. Une quinzaine de minutes plus tard, ils ont entendu le tonnerre et ils ont vu la lumière de la foudre dans le ciel. L’un des travailleurs a mentionné au travailleur victime de l’accident que l’éclair semblait proche, sans obtenir de réponse de sa part. À 19 h 47, la foudre a frappé le travailleur. À la suite de ce coup de foudre, les travailleurs ont quitté le champ immédiatement. En se rendant aux véhicules, ils ont constaté que la victime était manquante. Ils ont alors aperçu de la brume qui se dégageait de l’endroit où la foudre avait frappé. Ils ont couru jusqu’à cet emplacement et ont alors trouvé leur collègue gisant sur le sol. Les services d’urgence ont été appelés et les premiers soins ont été prodigués au travailleur accidenté. Ce dernier a été transporté à l’hôpital, où son décès a été constaté.
Qu’aurait-il fallu faire?
Bien que les travailleuses et les travailleurs ont l’obligation de prendre les mesures nécessaires pour protéger leur santé et leur sécurité, l’article 51 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail (LSST) décrit les obligations des employeurs à leur égard. Il stipule, entre autres, que l’employeur doit « s’assurer que l’organisation du travail et les méthodes et techniques utilisées pour l’accomplir sont sécuritaires et ne portent pas atteinte à la santé du travailleur » et qu’il lui incombe également d’« informer adéquatement le travailleur sur les risques reliés à son travail et lui assurer la formation, l’entraînement et la supervision appropriés afin de faire en sorte que le travailleur ait l’habileté et les connaissances requises pour accomplir de façon sécuritaire le travail qui lui est confié ».
De plus, Environnement et Changement climatique Canada a émis des recommandations afin d’éviter les dangers liés à la foudre. Parmi elles, on retrouve le fait d’éviter les activités extérieures lorsque des orages sont prévus, de repérer les endroits sécuritaires pour se mettre à l’abri et d’estimer le temps qu’il faudra pour les atteindre. Environnement et Changement climatique Canada conseille aussi d’observer le ciel pour y déceler la formation d’un orage et de se réfugier dans un immeuble entièrement fermé ou un véhicule dès que le tonnerre se fait entendre.
Quelques signes annonciateurs d’un orage
- De plus en plus de nuages sombres
- Un nuage imposant, très haut, dont la base est foncée
- Un changement de température
- L’arrivée d’un vent frais, qui peut annoncer une averse accompagnant un orage
Finalement, selon l’organisme américain Occupationnal Safety and Health Administration (OSHA), les employeurs doivent être au fait des risques associés aux orages et ils doivent élaborer des règles de sécurité à suivre en cas d’orage pour assurer la santé et la sécurité des travailleuses et des travailleurs.
Ainsi, pour satisfaire aux obligations de l’article 51 de la LSST, l’employeur dont les travailleuses et les travailleurs effectuent des tâches à l’extérieur et qui sont susceptibles d’être frappés par la foudre devrait notamment élaborer une procédure en cas d’orage. Celle-ci devrait comprendre, entre autres, des mesures de surveillance des conditions météorologiques (comme des bulletins de prévisions météorologiques), des moyens de communication afin d’aviser les travailleuses et les travailleurs des prévisions et des alertes météo, les actions à prendre et les endroits sécuritaires pour s’abriter le plus rapidement possible ainsi que le temps d’attente après le passage de l’orage avant de sortir de l’abri (soit 30 minutes). De même, l’employeur doit s’assurer d’informer les travailleuses et les travailleurs sur les signes annonciateurs d’un orage, sur les particularités de la foudre ainsi que sur la procédure à suivre en cas d’orage. D’ailleurs, un exercice de mise en application de la procédure permet de s’assurer que les participantes et participants la comprennent bien.
Dans le cas de cet accident, les travailleuses et les travailleurs n’avaient pas été informés de la procédure à suivre si un orage se manifestait et du danger que représentait la foudre. Ils ont poursuivi leurs tâches dans le champ lors du passage de l’orage et ont ainsi été exposés au danger d’être frappés par la foudre.
Personne-ressource : Pierre Privé, coordonnateur aux enquêtes, Direction générale de la gouvernance et du conseil stratégique en prévention à la CNESST
Enquête réalisée par : Geneviève Girard, M. ing., et Stéphany Beaudry, CRHA
Pour en savoir plus :
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Pour accéder à la simulation de l’accident :
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