Poursuite pénale en santé et sécurité du travail : processus, objectifs et amende réclamée

Par Gabrielle Payette-Hébert, avocate

22 octobre 2024

Photo : insta_photos/Shutterstock.com

Martine est présidente d’une entreprise de revêtement de toitures. En mai 2024, une inspectrice de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) a ordonné un arrêt des travaux; l’un des travailleurs de l’entreprise n’était pas protégé alors qu’il était exposé à un risque de chute à une hauteur de plus de trois mètres. En octobre 2024, l’entreprise a reçu un constat d’infraction pour avoir contrevenu à l’article 2.9.1 du Code de sécurité pour les travaux de construction (CSTC). Deux éléments étonnent Martine. D’abord, le constat est signé par quelqu’un d’autre que l’inspectrice. Ensuite, l’amende réclamée est de 2 428 $, alors que l’amende minimale indiquée est de 2 021 $. Sur le constat, Martine lit : « Entreprise spécialisée ». Comment cela est-il possible?

En santé et sécurité du travail (SST), c’est une avocate ou un avocat de la CNESST qui agit comme procureur poursuivant. La décision d’intenter ou non une poursuite pénale lui revient. Ce processus comprend trois étapes :

  1. Vérifier si la preuve est suffisante pour démontrer, hors de tout doute raisonnable, les éléments essentiels de l’infraction.
  2. Si la preuve est suffisante, déterminer l’opportunité d’engager une poursuite selon, notamment, la nature de l’infraction, sa gravité, ses conséquences, les antécédents de la partie défenderesse et le besoin de dissuasion.
  3. Si une poursuite est intentée, déterminer le montant de l’amende en tenant compte des facteurs aggravants et atténuants, suivant la preuve disponible et en opportunité.

Comme la Loi sur la santé et la sécurité du travail (LSST) ne prévoit pas de délai pour intenter une poursuite, celui-ci est d’un an à compter de la date à laquelle l’infraction a été commise1.

La LSST prévoit des amendes minimales et maximales selon la nature de l’infraction2 et le type de personnes visées3. Ainsi, en 2024, pour une infraction à l’article 236 de la LSST, l’amende minimale était de 807 $ pour une personne physique et de 2 021 $ pour une personne morale. Ces peines sont augmentées le 1er janvier de chaque année4. Des frais s’ajoutent aussi au montant de l’amende réclamée5

L’amende imposée vise à produire un effet dissuasif en favorisant la prise en charge de la prévention6. Voici quelques-uns des facteurs aggravants pouvant faire augmenter l’amende : les condamnations antérieures, la matérialisation du danger, la connaissance, par une personne en autorité, de l’état dérogatoire et le fait que la personne visée soit spécialisée dans le domaine visé par l’infraction7.

En ce qui concerne l’entreprise de Martine, le constat d’infraction reçu est signé par le procureur poursuivant qui a décidé d’intenter la poursuite. Il est de 2 428 $ puisque son entreprise se spécialise dans un secteur d’activité où le travail s’effectue en hauteur, soit le sujet de l’infraction qui lui est reprochée

  1. Suivant l’article 14 du Code de procédure pénale, RLRQ, c. C-25.1.
  2. L’article 236 de la LSST concerne la contravention aux dispositions de la loi ou à celles de ses règlements, tel le CSTC. L’article 237 de la LSST concerne la compromission directe et sérieuse de la santé, de la sécurité ou de l’intégrité physique ou psychique d’une travailleuse ou d’un travailleur.
  3. Les articles 236 et 237 de la LSST prévoient des peines distinctes pour les personnes physiques (ex. : travailleuse ou travailleur, gérante ou gérant, surintendante ou surintendant, contremaître, administratrice ou administrateur ou encore dirigeante ou dirigeant d’une personne morale) et les personnes morales (ex. : compagnies et organismes publics).
  4. L’article 237.1 de la LSST renvoie à la méthode de revalorisation prévue aux articles 119 à 123 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (LATMP).
  5. Comme établis au Tarif judiciaire en matière pénale, RLRQ, c. C-25.1, r. 6.
  6. Commission de la santé et de la sécurité du travail c. Location d’outils Budget inc., 2009, QCCQ 4873, para. 75.
  7. Pour les autres facteurs, consultez le Cadre d’émission des constats d’infraction, CNESST, janvier 2024.

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